Pierre debout et parabole. 1994.
granit Blanc d'Espagne, acier et peinture polyuréthane, acier cortène.
H 260 x L 820 x l 120.
Commande de la ville de Firminy, (Ministère de l'Equipement et de l'Urbanisme.)
La question du lieu
Du quartier de "Firminy vert", j'ai choisi sa porte, constituée par cette transition entre l'ancien et le Firminy moderne. Implanter une sculpture publique doit tenir compte du lieu : matériel, historique et sensible, en rapport avec ma propre pensée artistique, et mon histoire. L'une des premières impressions ou sensations lorsque je déchiffre ce lieu, c'est le paradoxe de l'urbain et du matériel qui se mêlent ici, avec la verticalité acérée des bâtiments et celle des grands arbres, leur verdure, le vert des pelouses, le rythme des troncs. Et puis il y a à proximité la blancheur de l'Eglise St-Pierre de le Corbusier...
La question du sens
Immédiatement j'ai voulu que ma sculpture se différencie tout en prenant les formes génériques de cet espace. Rompre la verticalité, en inclinant "une masse", introduire une courbe, signifier le temps immémorial, l'art, et leur rencontre avec la mémoire d'un lieu industriel. Faire de cette sculpture un signal avec une grande simplicité, une efficacité de la forme.
La question des matériaux
J'ai choisi la pierre. Un monolithe en granit blanc d'Espagne de deux tonnes, en prenant le parti de le "basculer" par une cale et de le retenir dans un même temps par un arc an acier peint. Jeu d'opposition dynamique.
Cette pierre à la fois clarté et densité, module le poids du temps, bien au-delà des choses construites, comme un monument qui servirait à quelque chose qui n'a pas de nom, qui est l'art, pas d'usage précis, si ce n'est d'être légèrement basculé, épais, compact, crénelé pour laisser l'ombre dessiner les volumes, créer un mouvement sur le pourtour de la pierre et venir marquer la contradiction face à la verticalité, l'équilibre du lieu.
L'arc rouge qui retient cette pierre fait signe, clinquant, très visuel du même rouge que la signalétique routière. Il est là pour dévier toute la gravité et la fragilité de la pierre inclinée. L'arc est aussi la référence à cette mémoire culturelle du site industriel, métallurgique que représente la ville de Firminy. Cet arc forme un cercle virtuel dont une grande partie serait enterrée, comme pour générer un mouvement transperçant la pierre. Il nous donne aussi l'orientation est/ouest en direction de l'orient de l'Eglise de le Corbusier. C'est comme une réponse à ce lieu ou une tension vers ce lieu.
La cale en acier cortène est l'autre face du basculement, c'est un coin qui vient briser la stabilité de la masse en granit. L'acier cortène est un acier inaltérable qui s'auto-protège par la rouille qui se forme à sa surface. Il nomme l'usure et le vieillissement arrêtés, c'est l'autre présence de la couleur, qui paraît naturelle par opposition au rouge peint de l'arc qui est appelé à se transformer dans le temps.
Sur ce rond-point la sculpture sera visible dans un panoramique circulaire. C'est de l'ensemble de ces mouvements que cette sculpture est faite : à la fois matériels, à la fois mentaux, culturels, en nous liant par la vision et la sensation aux choses complexes de l'art, à l'histoire de Firminy, de Firminy vert, et au secret qui doit habiter discrètement chaque œuvre.
Marc Chopy - le 15 juin 1994.
Sculpture publique, site le Corbusier, Firminy vert.